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La lumière bleue est-elle dangereuse pour la rétine ?

Synthèse rédigée par le Dr. Christophe Orssaud, Président du Collège Santé de l'AFE

2018-11-06 │16:50

Cette note a été rédigée par le Dr. Christophe Orssaud, Président du Collège Sante de l'AFE, Responsable de l'Unité Fonctionnelle d'Ophtalmologie aux Hôpitaux Universitaires Paris-Ouest (CRMR OPHTARA HEGP, AP-HP Paris) et le Pr. Christian Corbé, Président d'honneur de l'AFE et Professeur d'ophtalmologie et de Physiopathologie sensorielle aéronautique et spatiale. 

Les effets sur l'œil de la lumière bleue à laquelle nous pouvons être exposés dans la vie courante restent difficiles à apprécier. Il faut prendre avec prudence les études animales portant sur la lumière bleue. Elles ont néanmoins le mérite d'évoquer les risques liés à un usage inapproprié des écrans. Pour rappel, en 2018, le temps moyen passé chaque jour sur écran est de 6h09 chez les adultes et de 9h43 pour les 16-24 ans[1].

Chez l'animal, les forts niveaux d'exposition prolongée à la lumière bleue utilisée dans les études sont responsables d'une disparition progressive des photorécepteurs oculaires (phototoxicité). Par une transposition à l'Homme de ces résultats, il est facile de considérer que cette mort des photorécepteurs va aboutir à des pathologies graves et cécitantes mimant la dégénérescence maculaire liée à l'âge (DMLA).

Mais les conditions d'examen ne permettent pas d'effectuer de transposition de l'animal à l'homme. Il existe en effet plusieurs facteurs limitant à cette transposition :

  • Le premier d'entre eux concerne la difficulté de connaître la quantité de lumière bleue pénétrant réellement dans l'œil. Les LED des éclairages urbains, que l'on ne regarde pas directement, exposent moins à cette lumière que le soleil ou les écrans. Pour ces derniers, il faut également tenir compte de la distance à laquelle ils sont regardés. Les smartphones et autres tablettes étant certainement les sources les plus importantes.
  • Le second facteur est lié à l'utilisation de modèles animaux. Or les animaux choisis possèdent des rétines qui présentent des différences par rapport à la rétine humaine.
  • Enfin, la nécessité d'obtenir des effets rapides imposent d'avoir recours à des temps et des niveaux d'éclairement qui sont éloignés de ceux reçus par l'Homme dans la vie quotidienne.

De plus, une équipe de l'Université de Toledo (équipe ayant publié à l'été 2018 une étude indiquant une destruction des cellules de l'œil liées à une réaction chimique entre lumière bleue et rétinaldéhyde) a démontré l'existence d'une molécule (l'alpha-tocophérol), qui est capable chez l'Homme de réparer les cellules altérées par la lumière bleue et ainsi éviter leur disparition. Les études réalisées ne permettent pas de savoir s'il existe un effet seuil au-delà de laquelle une exposition devient irréversible malgré cette molécule.

S'il fallait retenir quelques règles d'hygiène lumineuse… :

- Ne pas regarder d'écrans au moins deux heures avant d'aller se coucher
- Ne pas regarder d'écrans dans le noir (contraste trop fort).
- Toutes les 20 minutes, levez les yeux des écrans pendant 20 secondes et fixer un point à 6 mètres
- Ne pas regarder directement les sources lumineuses
- Ne pas s'approcher d'une source lumineuse à moins de 30 cm
- S'exposer au moins une heure à la lumière naturelle tous les jours
- Porter des lunettes de soleil par beau temps, la plus grande source de lumière bleue demeurant le soleil

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

[1] Association nationale pour l'amélioration de la Vue (AsnaV) – 2018